«Casa Negra» ou quand Lakhmari rend hommage à la ville blanche Mustapha Bourakkadi : Nouvelle aventure pour un trublion du cinéma marocain. Le premier coup de manivelle du second long métrage de Noureddine Lakhmari, «Casa Negra», sera donné le 26 mars prochain. «...C'est un hommage que je voulais rendre à la ville blanche qui, pour moi enfant de la petite ville de Safi, représentait le rêve, la métropole. Les grands boulevards, les immeubles impressionnants par leur taille, me faisaient penser à l'Europe...», explique-t-il sa motivation pour ce nouvel opus. Noureddine Lakhmari,
Ce film, dont le budget se monte à 13 millions de dirhams, sera tourné en sept semaines. Sa sortie est à prévoir pour la prochaine édition du Festival de Marrakech. «Casa Negra», c'est l'histoire de Karim et Adil, deux jeunes d'une vingtaine d'années vivant à Casablanca. Ils cherchent tous les deux leur place dans la société. Ils sont chômeurs et à la charge de leur parents. Karim, le plus âgé, semble plus responsable.
Selon lui, c'est en s'habillant correctement et en travaillant qu'il pense pouvoir réussir. Son business : faire travailler pour lui des enfants des rues, vendeurs de cigarettes. Un jour, la police débarque sur son territoire et rend la vie difficile à «ses employés». Karim, pour aider sa jeune sœur, élève brillante, à poursuivre ses études, décide de grimper d'un cran dans l'échelle…de la délinquance.
Le réalisateur propose une vision différente de la ville et de ses gens,«...Casa Negra, malgré son titre assez noir, c'est un film pour l'espoir, une histoire qui montre l'intelligence de cette jeunesse, aussi brillante que celle des pays développés, mais qui manque de moyens pour réaliser de grandes choses... C'est aussi une occasion de parler d'une ville que les habitants n'ont pas appréciée à sa juste valeur, participant activement à la rendre laide...» Privilégiant la vraisemblance, Lakhmari se propose de créer des personnages complexes avec des profils psychologiques précis et réalistes. Il essaye par cette nouvelle expérience de couper avec l'écriture plate qui est souvent reprochée à notre cinéma, «Le problème de l'écriture est une réalité dans les films marocain.
Nos cinéastes mettent souvent l'accent sur le politiquement correct, ils pratiquent l'autocensure d'une manière presque systématique, d'autant plus que les scénarios manquent de rythme, les personnages ont besoin de plus de profondeur. Je trouve qu'on n'entre pas assez dans la psychologie des profils présentés.
C'est ce qui fait que le public boude ce cinéma, car il ne le représente pas. A mon avis, nous devrions couper avec l'attitude hautaine vis-à-vis du spectateur moyen. En fait, le Marocain possède une bonne culture de l'image, on ne peut plus lui offrir de la médiocrité sous prétexte qu'il ne comprend rien au 7e art» s'insurge-t-il contre une réalité qui ralentit l'essor du cinéma national.
Son ambition est de faire des films mettant en relief la structure dramatique, «Il y a quelques années, on se battait pour faire des films techniquement corrects. Aujourd'hui on a compris que c'est le thème qui est important. Raconter une histoire en images, c'est d'abord mettre l'accent sur les conflits. Malheureusement, dans nos films, on se limitait à présenter ces conflits à un niveau verbal. Les vrais conflits sont ceux qu'on peut rendre visuels.
A mon avis, les gens ne se rappellent pas de ce qu'on dit, mais plutôt de ce qu'on fait. Je pense qu'un personnage devient intéressant lorsqu'il réagit, fait des choix. Il devient le résultat de ses choix. Il faut dire que l'être humain est complexe. Tout a été dit dans le cinéma. Maintenant, nous avons l'obligation de rendre nos histoires intéressantes.
C'est en fait un jeu de séduction, un exercice dur qu'il faut prendre au sérieux. Le misérabilisme n'a plus droit de cité et la médiocrité finira par disparaître...»